Elle lui attrapa le bras pour l'emmener avec hâte vers le réfectoire.

" Après ça ! On demandera un compartiment pour toi, puis si tu veux, tu peux demander à être intégrée au mien, j'y suis seule, j'aurais le temps de tout t'expliquer comme ça ! "

Elia semblait être une fille énergique, pleine de vie. Une jeune femme fort aimable.

Elle poussa une porte, celle qui était en face de moi lors de mon arrivée. Nous traversons ainsi à la hâte un couloir, à la fois sombre mais éclairé par des lumières vives, mais peu étendues. Vous voyez ce genre de lumière aveuglante mais finalement quasi inefficace? Je peinais à en voir le bout, alternant entre jour et nuit mes yeux peinaient à s'adapter à ces violents changements. 

Une pièce s'ouvre ensuite mais je n'en comprends pas l'utilité, des tableaux semblant lister quelque-chose ornent les murs mais hormis ça cette pièce me paraît relativement vide et épurée.

Nous empruntons un escalier en direction du deuxième niveau inférieur. Il ne faut pas être claustrophobe ici.

Une grande pièce nous accueille alors, semblant être un salon, accueillant, chaleureux, agréable. Mais visiblement, pas le temps de nous attarder ici, Elia se hâte encore plus que jusqu'alors. 

Sur notre droite se présente un immense couloir encore plus long que le premier, mais très étroit (comme le rectum d'une vierge), en revanche on y voit déjà plus clair. La lumière n'est pas agressive, pas douce non-plus, mais agréable, comme filtrée.

Plus nous avançons et plus les effluves de nourriture nous parviennent. Cette odeur m'enivre. 
Une semaine sans manger, j'ai tellement faim que je pourrais avaler un sanglier, maintenant, tout de suite. 
Tant pis si Shaytan vient me ronger les doigts de pieds durant mon sommeil, donnez-moi du pain, du vin, du boursin, du porc, du chien que sais-je, donnez-moi n'importe-quoi, 

Grâce au statut d'Elia nous avons pu doubler tout le monde dans la file. Cela m'a quelque peu mise mal à l'aise mais la faim qui m'assaillait me fit vite relativiser.

Elia attrapait deux repas puis me dirigeait vers une table un peu à l'écart.

Nous nous asseyons, j'ai tellement hâte de pouvoir goûter ce plat.

Mon acolyte du jour me souriait alors que je m'apprêtais à avaler mon assiette et son contenu.

"Bonne app' ! Tu peux prendre mon assiette si tu veux j'ai un stock de friandise dans mon compartiment !"

Cette jeune femme m'est vraiment agréable. Elle m'inspire confiance, et je suis d'ailleurs très touchée qu'elle m'accorde aussi rapidement la sienne en me proposant une place dans sa chambre. 

J'y pense. Je ne l'ai même pas remerciée tellement mon estomac hantait mes pensées. 

«je... Elia ? Je te remercie pour ce que tu fais pour moi, tu n'y étais pas obligée. J'avais tellement faim que j'en ai oublié de te remercier pour ta proposition d'intégrer ta chambre. Alors... Merci. »

Je rougis un peu, je n'ai pas l'habitude de livrer mon ressenti de la sorte. 
Mais la demoiselle est si gentille avec moi, elle sait me mettre à l'aise. Pourtant d'un naturel méfiant, j'ai envie d'y croire, qu'il puisse rester un soupçon de bon dans l'humanité. 

Je vais tout de même rester sur mes gardes. Trop souvent trahie par le passé, je dois me protéger.

Un petit pois espiègle s'échappant de mon assiette me sorti de ma réflexion intérieure. Le malin roulait jusque sous la table voisine.
Je me mis à rire en l'imaginant chanter "libéré, délivré ! Tu n'me mangeras plus jamais !", ça me rappelle ma jeunesse, lors d'un de mes voyages dans ma famille paternelle en France, où j'avais emmené mes neveux au cinéma, et depuis ils n'ont eu de cesse de la chanter, me rendant dingue. 

Je me penche donc pour récupérer mon suicidaire ami légumineux, quand la conversation adjacente effleura mes oreilles. 
Je ne pu m'empêcher d'écouter discrètement. 

«pardon, excusez-moi, faites comme si j'étais pas là !»

Mon petit grain de mini Hulk en puissance sauvé, je retourne alors à ma conversation originelle. 

«Désolée, j'avais perdu un petit pois. 
Elia dis-moi, est-ce vrai ce que disent les personnes d'à côté ? Le bunker serait dans un piteux état et les vivres viendraient à manquer ? 
Excuse-moi mais, je ne sais toujours pas ce que nous faisons ici, que s'est-il passé à la surface ? Sommes-nous condamnés à passer le reste de nos jours ici ? Je n'ai pour seules infos que ce bout de papier qui m'a mené ici »

Je lui tendis alors le plan avec les inscriptions au dos.