Il le savait, il était trop fort. Il n’avait pas ses lunettes pour regarder la pièce, mais la réaction de la pimbêche en face suffisait. Bon, c’était un bête jeu de hasard, l’expérience n’avait rien à voir là-dedans (même s’il pensait Amy capable de « trafiquer » le jeu d’une manière ou d’une autre. Du genre... lancer la pièce de tel angle avec telle vitesse pour qu’elle tombe sur le côté de son choix ! Ha ha !). Mais bon, là, qu’importe, il avait remporté la manche. Il n’hésita pas non plus à lever les bras, comme un gagnant de loterie (qui rentre chez lui avec un gros chèque, hein, pas le kilo de viande de la brasserie d’à côté) ou bien comme un joyeux luron qui descend les montagnes russes. Oh allez, quoi, gagner contre Amy, ça valait bien la peine de se lâcher, non ? 
 
- BAM ! Ouuuh ! Qu’est ce que ça dit, là ? Hm ? Ça dit plus rien, heiiin ? Aah, ça dit plus rien !
 
Quelle fierté, quelle joie, quel honneur ! Il avait vaincu l’ennemie ! (C’était plus la bataille que la guerre, mais bon, c’était cool à ressentir) Il l’avait mise à terre ! Massacré ! Ratatiné ! Et regardez, là, elle savait plus où se mettre ! Perdre à son propre jeu qu’on a osé proposer soi-même, c’était le summum des boss finals de la honte suprême ! Elle pouvait regretter d’être venu l’emmerder, celle-là ! 
 
- Allez, aboule le dessert, petite.
 
Il tendit la main, paume présentée et détendue, s’attendant à sentir le petit pot en plastique lui tomber dessus. Hélas, cette bonne et douce Amy s’était porté volontaire pour lui donner la becquée à sa manière. Son visage, après la purée, rencontra le yaourt.

« TIENS. BON APP' SURTOUT. »

Vexée, boudeuse, et certainement pas coupable de son geste, Amy adopta une attitude plus posée après le crime commis. Il n’en était bien sûr rien d’Arnold qui, faut l’avouer, en avait marre que sa tête mangeait plus que son estomac. Contrairement à tout à l’heure, le scientifique resta de marbre, et dit seulement : 
 
- Amy... 
 
Avant que le diable ne surgisse. C’est dire à quel point lui-même n’en revenait pas, de ce qu’il allait faire. 
 
- Tu veux un bisou ?
 
Car bon, voilà : Arnold, il détestait Amy. Alors pour qu’il ose, fallait vraiment qu’il soit très très grincheux. Lui qui était aussi réactif qu’un iceberg géant, il se leva brusquement de sa chaise, se penchant au-dessus de la table et des plateaux, et attrapa le visage de sa rivale. Évidemment, c’était loin d’être instantané, puisque Amy résistait (encore heureux). On aurait dit une sorte de bras de fer, où il essayait de la tirer vers lui, et elle, de s’éloigner. Hélas, la nature a donné quelques muscles et résistances en plus à Arnold (comparé à Amy, y’avait pas photo). Et après mille « gnnnn » et autres « aaaargh » ridicules entre eux, Arnold parvint à « MUAAAH » la vilaine. 
 
Ça n’avait PAS DU TOUT l’air d’un baiser. C’était plus une sorte de coup de boule qui dure, vu comment il lui écrasait les joues entre ses paumes, et comme il forçait ses lèvres contre les siennes; dans le seul et enfantin but de lui rendre son putain de dessert. Il la relâcha, les faisant basculer chacun sur leur chaise, et Arnold put constaté avec une vision floue que le visage de la petite peste était aussi bien maquillé que le sien. Ils étaient super sexy, tout les deux.